Jeanne Weber, « L’Ogresse de la Goutte d’Or »
Née en 1874 à Kérity (commune actuelle de Paimpol dans les Cotes D’Armor), Jeanne Weber est l’aînée d’une fratrie de 5 enfants. Elle arrive à Paris à l’âge de 14 ans pour chercher un emploi. Elle épouse en 1894 Jean Weber, un cocher alcoolique notoire souvent absent. Ils s’installent dans le quartier populaire de la Goutte d’Or (actuel 18e arrondissement) et auront 3 enfants dont deux décèdent en bas âge. Jeanne aime les enfants qu’on lui confie d’ailleurs volontiers.
Le 2 mars 1905, Jeanne garde, chez elles, ses 2 nièces le temps pour sa belle-sœur de se rendre au lavoir quelques rues plus loin. La mère de la fillette rentre chez elle pour constater son décès. Jeanne n’est pas suspectée. Quelques jours plus tard, elle garde de nouveau sa nièce, la survivante, qui décède quelques heures plus tard. Jeanne n’est toujours pas suspectée pas plus que lors du décès de son autre nièce au moment où elle la gardait, ni lors du décès de son propre fils dont tout le monde savait qu’il avait la santé fragile.
Ce n’est que le 5 avril quand meurt l’un de ses neveux durant la sieste, sous la surveillance de Jeanne que les soupçons commencent, les médecins constatant des traces rouges sur le cou laissant penser à une tentative d’étranglement.
La machine judiciaire est lancée, Jeanne est emprisonnée à la prison pour femmes de St Lazare. Son procès s’ouvre, aux assises de la Seine, le 29 janvier 1906. Des femmes se sont massées devant les grilles du Palais de Justice pour réclamer la condamnation à mort de la prévenue. Mais les audiences vont en décidément autrement. Son avocat Henri Robert lamine le dossier d’accusation, déjà fort malmené, et obtient l’acquittement de sa cliente sous les acclamations du public.
En 1907, après une tentative de suicide, elle change de vie, de nom (elle est désormais Jeanne Glaize) et part s’installer dans le département de l’Indre à l’invitation d’un cultivateur veuf. Elle devient maîtresse de maison et s’occupe des 3 enfants. Mais le 17 avril 1907, le dernier enfant meurt. Or le cultivateur, seul à savoir la véritable identité de Jeanne, se confie à ses filles et le lendemain des obsèques de leur petit frère, l’une d’elles va tout expliquer à la police.
Jeanne sera arrêtée et incarcérée. Le second procès n’aura pas lieu, Me Henri Robert ayant obtenu un non-lieu le 6 janvier 1908. Elle est libérée.
Elle est hébergée par un autre cultivateur de Meurthe-et-Moselle qui croit avoir trouvé une nouvelle compagne. Mais Jeanne mène une vie de débauche et le quitte pour un jeune ouvrier, avec qui elle s’installe dans une chambre d’hôtel de Commercy dans la Meuse. Deux jours plus tard, le fils des hôteliers meurt dans son lit. Jeanne est surprise debout près du cadavre. Et, là, les résultats de l’autopsie sont formels : l’enfant est bien mort de strangulation, aucun organe ne porte la plus petite trace d’une quelconque pathologie.
Jeanne est envoyée à la prison de Saint-Mihiel, dans l’attente de son procès, qui n’aura pas lieu.
Le 20 mars 1909, Jeanne Weber, déclarée folle, est transférée à l’asile de Fains-Véel, toujours dans le département de la Meuse. C’est là qu’elle mourra, en juillet 1918, sans jamais avoir avoué aucun de ses crimes.
Ci-dessous quelques extraits du rapport médical du Docteur Alexandre Pâris, expert commis par le ministère public dans l’affaire Jeanne Weber, dite « l’Ogresse de la Goutte d’Or ». Nancy, 30 octobre 1908. Acquisition 2020.